Dr Pierre Sabourin  
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DE LA COMPLICITÉ INCONSCIENTE AU PASSAGE À L'ACTE SEXUEL (2008)

COLLOQUE : PEDOPHILIE AU FEMININ, pour le XXe anniversaire du CENTRE des BUTTES CHAUMONT, sous l’égide de la Fondation pour l’Enfance, Paris le 13 Juin 2008

 « Imite le moins possible les hommes dans leur énigmatique maladie de faire des nœuds ». R.C.

Cette réunion d’aujourd’hui est pour moi l’occasion d’un survol.

Une évidence s’impose: pédophilie et inceste font partie du vaste ensemble des maltraitances à enfants. Ce n’était pas vrai il y a 20 ans, encore moins en 68 quand je travaillais à St Anne en psychiatrie d’adulte, à l’ hôpital de jour de l’Elan et aussi au Centre de santé mentale du 13 ème. Le chemin parcouru est celui d’une lutte avec les idéologies, les tabous, les inerties face à tout changement du mode de penser.

Il y avait un trou dans la clinique en pédopsychiatrie, en psychiatrie de l’adulte, en psychanalyse, donc dans l’enseignement des médecins, des magistrats, des avocats, des psychologues des policiers et travailleurs sociaux…

Et Pourtant, depuis la nuit des temps, la violence faites aux enfants est une donnée incontournable, c’est le côté sombre de nos cultures: Sacrifices humains, infanticides, avortements, enfant exposé comme Œdipe, enfant séduit violé comme Hyppolite par Phèdre sa belle mère, pourtant dit-elle, il était «  chaste et respectueux », et non pas coupable comme par son mensonge elle l’en accusait. Chez Racine, Phèdre avant de se suicider reconnaît son forfait ,  c’est elle, la femme de son père,  qui a « osé jeter un œil profane, incestueux» sur son beau-fils, (le regard étant à l’évidence une métaphore de l’acte), mais Phèdre c’est une exception.; c’est rare dans notre clinique. Ces mères incestueuses avec leur fils ou beau–fils ou petit fils, leur fille ou belle-fille ou petite fille se positionnent aussi, comme Phèdre, par projection accusatrice, mais surtout par la négation de leur geste le désaveu de leur pulsion, les décompensations confuso-délirantes, les appoints toxico multiples ou la stupeur mélancolique… rarement l’aveu, et tout ceci est à son comble dans le syndrome de Münchhausen par procuration.

Ce trou dans la clinique masquait le passage à l’acte de l’inceste par l’adulte, qu’il soit d’origine paternelle ou maternelle: c’est un traumatisme majeur, violence dans la généalogie, irreprésentable, insymbolisable par l’enfant, impensable pour les soignants. Quant à l’atteinte sexuelle par une personne ayant autorité (que celle ci soit une autorité légale ou morale), les conséquences sont souvent tout aussi délabrantes.

C’est toujours une pathologie majeure de l’adulte qui fait exploser la sécurité de base de l enfant.

Et Pourtant chez FREUD, (lequel, n’a jamais renoncé à la théorie dite de la séduction, contrairement à ce qui s’enseigne dans les Facs), tout est en place, y compris dans son testament, L’ABRÉGÉ de psychanalyse, en 1938. Mais la lecture est impossible à qui ne veut pas lire. Il écrivait aussi à Ferenczi « Les traumas  nous devons les  déduire », mais cette phrase a été censurée pendant des années par les éditeurs… Ce trou dans la clinique a donc été aussi un trou dans les écrits cliniques et théoriques de Freud par les héritiers de sa doctrine : là aussi il y a eu un désaveu .…

Ce paradoxe va nous accompagner tout au long de ces 20 années où notre Centre des Buttes Chaumont prenait corps en confrontant nos logiques différentes travailleur social,

psychiatre, psychanalyste nous  regroupant autour de la thérapie familiale. A cette époque là c’est d’une part, la lecture des œuvres méconnues de FERENCZI, et d’autre part la pensée systémique toute nouvelle et ses auteurs prestigieux( Bateson, Mara Selvini, le professeur Nagy, Mony Elkaïm), qui nous ont permis de confronter notre clinique aux textes cruciaux de FERENCZI, ce pionnier parmi les pionniers: Confusion des langues, Réflexions sur le traumatisme, et sa correspondance complète avec Freud, à la traduction desquels textes  j’ai activement participé, jusqu’au troisième tome de cette correspondance paru en l’an 2000.

Et Pourtant les cas sociaux étaient une donnée de la pathologie ambiante, mais ils n’avaient pas de place dans l’arsenal dialectique des théoriciens, ils n’avaient pas les honneurs de la réflexion sur la structure.

Seul Winnicott dans une de ses dernières conférences (Newcastle 1970) insistait sur :

« …les laissés pour compte, ceux dont l’environnement n’a pas réussi à faire face à la situation, quelle qu’en soit la raison. Plus tard la rigidité de l’organisation défensive de ces enfants prouve qu’ils portent en eux des agonies impensables dues à un dysfonctionnement de l’environnement, ou à des dysfonctionnements répétés, et même très souvent répétés. Pour couronner le tout la société catalogue certains de ces enfants comme inadaptés; C’est une erreur. »

(«  La pédopsychiatrie, le travail social et les autres formes de prises en charge », in Thinking about children. L’enfant la psyché et le corps. Payot Paris 1999.)

Voilà un clinicien qui ose parler de ce qu’il constate: Les blessures vécues de l’enfant parce qu’impensables  entraînent non seulement leur agonie intérieure mais aussi l’erreur des professionnels. Quel champ considérable allait s’ouvrir à nous! Les laissés-pour-compte de la théorie….

Nous allons ainsi découvrir l’ampleur de ces pathologies familiales au fil de notre travail de recherche avec des magistrats et des avocats, d’où l’émergence d’une prise de conscience globale qui fera changer les textes législatifs ( loi du 10 Juillet 1989), ce dont nous avons rendu compte dans notre premier ouvrage collectif, en 1991, La Violence impensable, où se trouve en annexe à la deuxième édition (2004) l’évolution législative jusqu’à la loi du 10 mars 2004.(la quelle permet au victimes de viol de faire valoir leur droit à porter plainte jusqu’à 38 ans.)

A la même époque un clinicien Français, Paul-Claude RACAMIER, psychanalyste et psychiatre d’adultes exclusivement, a su créer le concept d’incestuel, soit  «  un climat où le vent souffle chez les individus, entre eux et dans les familles » écrit-il en 95,( Inceste et incestuel) pour évoquer cette ambiance pathogène sans passage à l’acte, mais hautement psychotisante malgré tout. Dans une veine comparable de création de néologismes, nous avons pris date dans cette évolution sémantique en introduisant ce diagnostic-concept de l’enfant incesté. Concept devenu d’usage courrant aujourd’hui, permettant l’indispensable distinction par rapport à l’enfant incestueux. Dans ces temps d’obscurantisme à la française, cette distinction en effet n’existait pas, il fallait donc trouver les mots justes:

L’enfant victime n’est pas inadapté à son milieu pathogène comme Winnicott l’a remarqué, mais au contraire il est sur-adapté ; quand il y a inceste c’est un enfant- incesté ; l’adulte masculin est quelquefois désigné incestueur quand il est particulièrement menaçant, dans certains cas la mère, instigatrice d’inceste, est qualifiée d’Incestigatrice.

Ce sera donc cette réflexion sur le contexte familial de l’enfant victime de son milieu de vie, ( parents légaux , naturels ou adoptifs, ou parents d’accueil), qui permettra un diagnostic judicieux de maltraitance incestueuse. Cas sociaux du tiers ou du quart monde, milieu rural ou urbain, mais aussi familles conventionnelles de la grande bourgeoisie comme de la petite, nouveaux riches, professions libérales, enseignants, militaires etc…; Des résistances persistent encore sous l’aspect de pseudo-diagnostics, par exemple « carence éducative » véritable cache misère des maltraitances criminelles camouflées. Sont encore laissés pour compte pendant des années des enfants en otage dans un système familial incestueux

(Pour rester en France chacun garde en mémoire les récits très médiatisés des procès d’Outreau et d’Angers, très différents l’un de l’autre quant à leur déroulement, mais où la violence sexuelle et la manipulation perverse de la mère incestueuse était au cœur de ces systèmes intergénérationnels. Voir aussi  les tortures vécues par Lydia Goiardeau,  relatées dans son livre récent, Le silence des autres )

Le diagnostic qui s’impose est donc celui d’un SYSTEME familial pathologique, plus ou moins étendu autour de la famille nucléaire, système opératoire depuis longtemps, ayant induit des conduites transgressives en série, des incestes à tous les niveaux avec le cortège clinique qu’il faut parfois rechercher activement pour le trouver :

menaces de mort, maltraitances physiques, séquestrations, humiliations, insultes, peur panique très précoces, (le fameux effroi sexuel dont parle Freud), maltraitances psychiques, sexuelles, communicationnelles, induisant comme conséquence des symptômes hystériques et psychopathiques, des mensonges de nécessité, des troubles caractériels, des rêves à répétition, des auto agressions sacrificielles sans fin…anorexies, automutilations, fugues, errance sexuelle, toxicomanies etc.. La preuve clinique majeure de ce système maltraitant est constituée par les reproductions des abus sexuels sur les plus jeunes et ensuite les reproductions aux générations suivantes ! La boucle est bouclée pour le sujet victime des ses inconscientes identifications à l’agresseur.

La résolution de son complexe d’OEDIPE n’est pas possible à un tel enfant ; il n’est pas pour autant psychotique mais au prise avec une névrose post-traumatique très grave, de forme phobo-obsessionnelle souvent, névrose d’échec ou psychopathie, avec des régressions en lien avec ses fixations traumatiques, des dissociations d’identité, voire des états de personnalité multiples.

«Pour couronner le tout » de ces dysfonctionnement «  très souvent répétés », comme Winnicott a osé l’écrire, ce système familial pathogène aura des résonances en série dans les systèmes de prises en charge de ces enfants, Aide sociale à l’enfance, foyers de placement, systèmes de soins psychologiques psychiatriques et psychanalytiques. Résonance, contamination et sur-victimisation de l’enfant vont persister jusqu’aux erreurs de diagnostic en série (depuis la première commission d’Outreau la notion de crédibilité de l’enfant qui était sur-utilisée de façon approximative, ne devrait plus être employée par les experts : c’est une des préconisations proposée).

Comme l’écrivait notre ami procureur Redon il ne s’agit pas de crédibilité mais pour le juge il s’agit qu’il se forge sa propre conviction.

Il y a vingt ans, nous avions donc le défi de trouver un cadre efficace pour une prise en charge nouvelle de ces pathologies là, une fois diagnostiquées correctement, et non pas 10 ou 20 ans trop tard, mais au moment même où ces atteintes sexuelles se perpétraient, c'est-à-dire chez l’enfant.

Pour parler de cette  « thérapie familiale de réseau des femmes incestueuses » , c’est donc sur la transgression de la loi de l’interdit de l’inceste qu’il convient de s’appuyer pour comprendre la déstructuration de l’espace familial. Quand cette loi est bafouée par un homme ou par une femme, les conséquences sont camouflées par les enfants eux-mêmes, (du fait de leur défense par clivage du moi et non par refoulement), et les enfants en grande souffrance sont tout désignés pour être victimes émissaires des systèmes de soins peu préparés, en médecine hospitalière, en hygiène mentale comme en privé, sauf quand ils rencontrent quelques rares thérapeutes d’exceptions..

 Donc, «  quand ces familles marchent sur la tête », (titre de notre ouvrage en 2004), ce sont les règles intrinsèques de ces familles qui ont force de loi, mais ce sont des règles perverses ! Devant ces attitudes délinquantes ou criminelles de l’adulte c’est l’articulation au judiciaire qui va s’imposer, sur son versant non seulement civil ( Juge des enfants, Juge aux affaires familiales, juge des tutelles), mais sur son versant pénal avec la prise de position basique : le signalement au Procureur de la République ce qui n’est pas identique au recueil d’informations préoccupantes). En effet les enfants victimes de ces maltraitances ont des DROITS, d’où l’importance de la plainte, du signalement, des enquêtes, d’une instruction, des expertises et d’un avocat pour cet enfant. Nous avons élaboré dans notre livre deux schémas, (désignés systèmanalytiques car ils conjuguent des concepts psychanalytiques et des concepts systémiques) et qui permettent de bien différencier les deux extrêmes : Quand l’éthique contextuelle est respectée et quand elle est bafouée : dans un cas il y a un espace de Jeu pour le Je de l’enfant; dans l’autre c’est l’inverse, car il y a menaces de mort doubles-liens et transgressions, ce qui entraîne : écrasement du moi, des attitudes d’autosacrifice et identifications inconscientes à l’agresseur..

En parallèle nous mettions au point la psychothérapie familiale de réseau pour d’abord constituer un filet de protection supplémentaire quand l’enfant a été séparé de l’abuseur ou de l’abuseuse ou des deux, et que cet enfant a un besoin urgent de reprendre confiance dans des adultes.

C’est là, en plus des deux thérapeutes présents, que nous accueillons dans la thérapie elle-même, les travailleurs sociaux en charge de l’enfant, les psychologues des foyers concernés, et les mères d’accueil… une administratrice ad hoc quand c’est possible. Ce regroupement autour de l’enfant permet l’élaboration du génogramme, premier acte thérapeutique pour appréhender l’éthique contextuelle, pervertie ou non, et pour évaluer la dangerosité ou la fiabilité du lien parent-enfant, pour ne pas succomber à l’idéologie du maintien du lien, quelquefois désadaptée.

C’est donc ce cadre de thérapie du système maltraitant lui-même, qui va durer jusqu’au procès des adultes incriminés avec rebondissements, nouveaux signalements concernant d’autres enfants-victimes, d’autres adultes impliqués, etc…

Thérapie familiale spécialisée, donc, indispensable avant que l’on puisse envisager une thérapie individuelle de ces enfants là . C’est dans ce contexte ci que l’on découvrira des dessins d’organes génitaux féminins, véritables pictogrammes vulvaires, des triangles pubiens parfois à la place de la bouche (comme reproduit sur la couverture de notre ouvrage), eux aussi très évocateurs, accompagnés des gestuelle masturbatoire avec des objets comme un nounours ou un jouet. (Ce langage préverbal est en tous points comparable à la sucette dans la bouche, ou au suçotement de la corne obscène d’une licorne en peluche en cas d’abus sexuel par un homme). Tous ces mimes comportementaux sont constitutifs de la sémiologie analogique c'est-à-dire non verbale, si importante à décoder.

Un pictogramme, c’est une écriture par image « qui ne représente pas un objet mais l’expérience partielle d’une rencontre entre une zone sensorielle et un objet apte à supprimer l’état de besoin ».. ( Piera Aulagnier) à quoi je préfère « état de tension » car il n’existe aucun besoin spontané chez un enfant non perverti. Voilà du langage analogique dont le rôle chez cet enfant abusé est de tenir lieu de la fonction de la parole. Parfois tout en dessinant et refusant de parler l’enfant peut se coller au paper board sur lequel il dessine et mimer le halètement orgasmique de son agresseuse qui l’a utilisé comme objet de jouissance sexuelle. Qu’il s’agisse d’une tante,d’une mère d’accueil pathologique, ou d’une baby-sitter, comme par exemple Stéphane Mallarmé la met en scène  quand il évoque :  

« Une négresse par le démon secouée,

Veut goûter une triste enfant aux fruits nouveaux

Criminelle innocente en sa robe trouée

Et la goinfre s’apprête à des rusés travaux. »

Notre travail sera donc centré sur la pathologie du lien mère-enfant super archi-traumatique, (pour reprendre la formule de Ferenczi), qu’il s’agisse d’une mère immature et malade mentale ou bien d’une mère psychopathe abuseuse sexuelle, d’une mère d’accueil pédophile, parfois véritable prédatrice capable de manipuler les services sociaux comme si elle était elle-même victime d’un complot, ou encore d’une mère ou d’une grand-mère incestueuse directement, amoureuse de son enfant sur un mode compulsif et fusionnel, ou encore d’une femme sous emprise incapable de réagir devant les humiliations qu’elle subi.

En effet l’histoire maternelle, souvent cachée jusque là, se révèle parfois aussi traumatique que celle de son enfant, sinon pire …victime d’abord devenue criminelle, avec prostitution plus ou moins reconnue.

Dans le cadre de l’évolution des pulsions de l’enfant Freud évoquait la mère phallique, ce qui est un autre plan de réflexion, mais surtout en 1933 il évoquait « la mère première séductrice », quand, écrivait-il,  «  le fantasme touche ici le sol de la réalité effective , car ce fût effectivement la mère qui lors des gestes requis par les soins corporels, ne pût que susciter des sensations de plaisir au niveau de l’organe génital, peut-être même les éveiller pour la première fois ».. ;»

On voit clairement la différence à faire entre ces « sensations de plaisir » fortuites du fait des « gestes requis par les soins corporels », à peine différenciés par Freud d’une banale découverte masturbatoire, et à l’inverse ces attitudes maternelles intrusives que nous venons de décrire et qui relèvent des passages à l’acte par des conduites transgressives de cette mère ancienne victime jamais soignée : complicité passive ou active ou parfois connivence inconsciente, la mère première perverse, c’est à dire incestueuse, avec parfois des justifications  : « C’est l’enfant qui désire ce contact sexuel »,  ou alors évoquant «le  droit à la jouissance de l’enfant » comme on l’entend dans les communautés homosexuelles.  Dans les formes les plus extrêmes de cette pathologie  se retrouvent des actes de torture, de barbarie, d’atteinte à la dignité humaine, soit toutes ces formes de la pédo-criminalité.

Une hypothèse est souvent vérifiée : quand une telle femme vit une crise conjugale, ( humiliation, maltraitance, viol conjugal…), se sentant abandonnée par le père de l’enfant, elle entame des conduites de vengeance sur l’enfant en se trompant de cible. En effet une étude en amont révèle les abandons maternels dont elle a été victime avant même les viols subis par elle, et le déplacement de cette haine inconsciente sur l’enfant.

Dans le cadre de cette psychothérapie familiale de réseau, c’est enfin notre attitude constante qui va s’appuyer sur l’amplification de la crise de la LOI ( signalements au Procureur de la République, insistance pour que soit désigné un avocat spécifique à cet enfant, décision de faire appel des non lieux etc..) car la non intervention confine à la complicité. C’est valable en politique ça l’est aussi face à ces maltraitances multiples,  y compris pour un médecin relevé du secret professionnel dès qu’il y a une présomption, ou encore un psychanalyste, qui, jusqu’à preuve du contraire est aussi un citoyen.

.Notre attitude en résonance avec les options judiciaires  sera un élément clef de notre stratégie en vue d’ un positionnement efficace, car on sait bien que la résilience de beaucoup de ces enfants est potentielle et ne demande qu’à s’épanouir. Encore faut-il se convaincre et les convaincre ensuite que leurs propres pulsions partielles, leurs conduites autodestructrices, et leurs mauvais résultats scolaires  sont des symptômes liés à l’agresseur incorporé et encore tout puissant. La meilleure des démonstrations sera faite par le soutien que nous apportons à ces enfants-victimes face à leurs angoisses pendant la préparation du procès de leur abuseur.

Notre exigence par rapport aux Droits de l’enfant et à l’Intérêt supérieur de l’enfant  va permettre l’efficacité de ce nouveau cadre de traitement.   

Parallèlement, des exemples de  transfert fait par ces enfants sur ce cadre de thérapie, sont décrits dans notre ouvrage, où sont détaillés les mouvements de haine de transfert et de compulsion érotiques sur les thérapeutes, avant qu’ils puissent trouver, pour la première fois, une capacité de parole de désir et d’amour.

Tout ceci n’a pas été facilement admis par les professionnels, même en 2008, même pour ceux qui sont présents avec nous dans ces séances de thérapie;  il y a encore du chemin à faire en particulier pour se déprendre de la mythologie bien partagée qui postule en toute mère une Sainte Vierge au dessus de tout soupçon.

Au cours de ces années fondatrices il y a eu des moments délicats avec certains conseils Généraux, avec certaines brigades, pour Martine, et en ce qui me concerne des plaintes devant le Conseil de l’Ordre des médecins, alors que le Code de déontologie médical stipule que «  Le médecin doit être le défenseur de l’enfant quand il estime que l’intérêt de sa santé est mal compris ou mal préservé par son entourage », article 43.

Je me souviens dans ce contexte après que je me sois positionné en témoin à l’occasion d’une session de Cour d’Assises pour le jugement d’un abuseur  d’ avoir été traité de « fliquiatre », ou de « professionnel de la collaboration avec l’appareil répressif »! .…Et dans une lettre ouverte, véritable pétition, c’est l’adolescent- victime qui a été désigné « affabulateur, revanchard et comédien » par les centaines de signataires. ,Quant à moi je me suis retrouvé stigmatisé par des insultes diffamatoires de la part de ce groupuscule Parisien de type révisionniste, solidaire du prévenu, en collusion active c'est-à-dire en complicité avec leur ami l’abuseur, qui, lui, s’est retrouvé condamné.

Loin de ces agitations  et combats d’arrière garde, permettez moi de terminer cette évocation rapide de ces années exaltantes par ces quelques mots de René CHAR, écrits dans l’immédiate après-guerre, dans « Rougeurs des Matinaux »:

Impose ta chance

Serre ton bonheur et va vers ton risque.. 

… Et la phrase suivante beaucoup moins connue, mais qui complète ce qu’il exprime avec cette force inimitable de sa langue d’exception:

 

       A te regarder ILS s’habitueront.

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Exposé le 28 Juin 2008 à l’aimable invitation des rencontres de l’Association de psychanalyse et d’anthropologie recherche, transmission, échange ( A.P.A.r.t.é)

 

 
     
     
     
     
     
     
     

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