Dr Pierre Sabourin | |||
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2011 | |||
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L'AUTOMNE SUR LE COEUR (1995) Texte publié dans Le Coq Héron, N°139, 1995, pp. 61-63 Invité au printemps 89 à faire deux conférences à l'Université de JICHI au nord de TOKYO, par mon collègue et ami FUJIYA Koïchi, participant d'un de mes ateliers de travail du Quatrième Groupe, j'ai eu l'occasion d'être confronté aux espaces culturels que l'Asie nous procure. Ces "Rapports de FREUD à la CHINE", de Geoffrey H. Blowers, et cet "accueil inégal" ,publiés aujourd'hui par le Coq, me fournissent l'opportunité d'une remémoration de certains détails. J'étais lesté du beau livre de TAKEO Doï sur cet intraduisible AMAE proche de "l'amour primaire" de BALINT, désigné en Français par cette périphrase du "Jeu de l'indulgence". Mais je devais leur donner quelques ouvertures sur la psychanalyse en France, les courants de pensée depuis Freud et Lacan, Ferenczi et l'originalité de ses recherches, mais aussi sur les positions que je soutiends dans le traitement des maltraitances faites aux enfants, abus de pouvoir, physiques, psychiques, sexuels, soit l'articulation entre les analystes et les systémiciens, vaste programme. Je ne suis pas certain d'avoir convaicu, même si j'ai suscité quelque intérêt, pour la raison suivante: Le rapport à la transgression n'est pas tout à fait le même. Par exemple, dans l'une de ces deux assistances se trouvaient deux des psychiatres-experts qui venaient de s'occuper du cas du célèbre cannibale, Sagawa; celui-ci venait de faire parler de lui après avoir découpé et fait cuire des morceaux de chair humaine, ici en France. Ramené au Japon par des collègues français il ne faisait pas de doute, pour ceux-ci, que l'état mental de ce jeune blouson doré japonais, issu d'un milieu tout à fait favorisé, avait été dans un état psychotique aigu, ce qui avait entrainé une irresponsabilité légale, à l'époque en France l'article 64. Mais sur place le malade en question avait trés vite été remis en liberté, devenu même un auteur trés médiatisé et reconnu dans certains milieux. Ma question à mes interelocuteurs fût alors de l'ordre d'un diagnostic quant à cet évenement insolite qui avait couté la vie à une jeune femme; il s'agissait d'abord d'un meurtre, aux circonstances troubles certes, avec peut-être un appoint toxicomaniaque, mais où la perversion dans la conduite du criminel ne semblait pas faire de doute, qu'il soit atteint de démence ou non au moment des faits. Ma surprise fût grande quand j'entendis ces collègues m'affirmer, qu'à leurs yeux, cet hommme était simplement un mythomane, étant donné qu'il avait dévellopé plusieurs versions de sa propre histoire.... Question subsidiaire quant à la femme-victime; j'entendis la réponse suivante: "Si elle avait été japonaise cela ce serait peut-être passé autrement...!" Malheureusement pour sa mémoire cette jeune touriste était Hollandaise, il n'y aura donc aucune réparation faite à son décès, quoique l'auteur du meurtre sadique ait promis dans une lettre à la famille d'aller se receuillir sur la tombe de leur fille...comme cela a été diffusé dans les médias quelques temps plus tard. Je leur parlais aussi du SIDA qui commençait en Europe à faire des ravages, mais la réponse fut aussi surprenante que celle que j'obtins à propos de l'inceste: "Au japon il n'y a pas de choses pareilles"...C'était plus nuancé mais sur ces sujets précis pas grande possibilité d'élaboration. Du Japon à la Chine les distances ne sont pas si grandes d'autant que l'accueil fait au Lacanisme au japon m'a semblé tout à fait problématique car le Lacanisme est devenu là-bas une philosophie...qui est naturellement intégrée à tout leur système pré-existant, sans aucun rapport ni avec la clinique psychiatrique (voir l'histoire du cannibale) ni avec la sexualité, (voir leurs dénégations outrées face aux éventualités des passages à l'acte incestueux entre parents et enfants). Comme cela est écrit dans l'article de BLOWERS sur l'accueil inégal de la psychanlyse:"...DAï, dans son enseignement a minimisé le rôle de la métaphysique freudienne et n'a pas mis l'accent sur les pulsions sexuelles car les chinois dans l'ensemble, ont une attitude plutôt naturelle à l'égard de leurs besoins biologiques"... " Ainsi la psychanalyse demeure-t-elle une source radicalement dérangeante d'un débat qui se poursuit en Chine". Si l'on se penche d'autre part sur l'optimisme de FREUD, comme il est écrit dans "les rapports de FREUD à la Chine:"Quant aux possibilités d'expliquer l'analyse des rêves par le recours à des exemples pris dans le Chinois et l'Egyptien, "c'est à dire "la tentative de FREUD pour expliquer l'indétermination inhérente aux rêves par analogie avec l'indétermination de l'ambiguité dans les langues anciennes", on s'aperçoit que cela" souffrait d'un excès d'ambition". En effet en langue chinoise cette affaire de l'ambiguité est réglée dans l'échange langagier le plus habituel de la manière suivante, quand dans une phrase apparait le mot ambigu, susceptible d'être confondu avec un homophone: Si le premier interlocuteur prononce "T'ien" (le ciel), comme il existe 16 caractères qui se prononcent de façon quasi identique avec quatre tons différents, il va préciser immédiatement en surcodant son information, à peu prés comme le faisaient autrefois les demoiselles des postes qui faisaient épeller A comme Anatole, B comme Béatrice ,C comme Célestine etc...A ceci près qu'en chinois c'est imposé par la structure spécifique de cette langue où il y a le plus d'homophones au monde En langue chinoise parlée c'est souvent un antonyme qui est proposé, en tous cas un mot d'usage courrant, associé au mot litigieux: soit par exemple "ciel comme dans ciel-terre", ce mot lui même se traduisant par le cosmos ou l'univers. De même une femme peut se présenter en disant "je m'apelle Claire comme Claire de clair-obscur". Ainsi les corrections automatiques lèvent les ambiguités spontanément, ce qui rend les difficultés trés sérieuses pour le non-initié, l'étranger qui cherche à se faire comprendre...Le pictogramme dans le rêve c'est une autre histoire. Je dois toutes ces précisions à mon fils Florent ainsi que l'histoire qui suit : "Deux amis se retrouvaient régulièrement pour boire; un jour cependant l'invité n'est plus venu. Son ami s'inquièta et envoya des serviteurs aux nouvelles; ils revinrent et lui dirent qu'il etait gravement malade car la dernière fois qu'il etait venu il aurait vu un petit serpent dans son verre, mais hélas, il l'avait déjà bu, c'était trop tard, il est tombé malade. C'est incompréhensible. Retournant donc sur les lieux, son ami s'installe à la place exacte où était l'invité; il lève les yeux et constate avec stupeur la présence d'un arc suspendu au mur, devant lui...Tout s'éclaire alors, et il envoie à nouveau les serviteurs pour inviter son ami malade car il a trouvé le moyen de le guerir. Au début celui-ci rechigne puis enfin se laisse fléchir et revient...Son hôte avait déjà préparé le repas et il lui demande de s'asssoir à son ancienne place, précisément...L'invité était tout anxieux, on lui sert à boire, il regarde dans son verre d'alcool, et soudain il voit apparaitre le petit serpent toujours là; il a des sueurs froides et l'hôte lui désigne l'arc au mur et lui dit: "Il n'y a pas de serpent ici, il n'y a que le le reflet de cet arc dans ton verre; il décrocha cet arc et le serpent disparut; son ami compris alors seulement dans un grand éclat de rire et fût gueri. Cet aphorisme est utilisé, dit-on là bas, pour les gens qui se font des idées fausses, la formule est représentée par quatre caractères qui se décomposent ainsi: Le bol, l'arc, le serpent, le reflet. Cela ne parlerait-il pas de la place inconsciente du sujet? ...Souviens toi, si tu bois trop souvent, toujours à la même place, avec le même ami, si un jour tu te sens persécuté par ce qu'il t'a fait boire ou voir ou croire ou sentir de son amour pour toi-reflet de tes désirs à toi même inconnus- figure phallique par excellence, narcissisme de vie et de mort, (BIOS en Grec est à la fois l'arc qui tue, et la vie), quel sujet vient donc bander son arc, vers quel objet de désir? Si la"bile noire" te fait vomir, si la mélancolie te fait délirer, si l'arbre en feu, c'est à dire l'automne te tombe sur le coeur, que tu sois en Chine au Japon ou ailleurs, continue de boire avec qui tu veux ...mais change de place... La mélancolie en langue chinoise se représente avec trois caractères :un arbre et le feu, arbre-feu, c'est à dire l'automne, sur un troisième caractère signifiant le coeur, (s'ignifiant, prenant feu...) |
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